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Viking

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20 mai 2009

La mine d'Ops

PREMIER IMPACT.

 

 

LA MINE D’OPS.

 

 

ISBN : 978-2-9523055-1-8

 

 

- Mon cher Viking, je crois que c'est pour toi.

 

Aussi discrètement que possible, l'homme jeta un rapide coup d’œil par dessus son épaule vers l’entrée de cette taverne des faubourgs encombrée par les spationautes en permission. A l'autre bout de la sombre salle envahie de fumée, deux immenses policiers en uniforme bleu et vert, fouillaient du regard les moindres recoins. Dans leurs mains, on pouvait apercevoir de redoutables Stéropé V, ces nouveaux fusils à intensité variable dont le rayon vous pulvérisait le mur le plus adamantin.

 

Satisfait de son observation, l'homme reporta son attention sur la silhouette beaucoup plus agréable de sa compagne. Elle était brune avec de grands yeux noirs et un superbe corps souple et musclé. Il choisissait toujours ses maîtresses souples et musclées, et si possible intelligentes et aimant peu la loi. Il les voulait fortes parce que, lorsqu'un homme de sa corpulence, capable de faire des nœuds papillons avec une barre d'acier, faisait l'amour, il ne lui fallait rien de fragile entre les mains.

 

- Je ne pense pas qu'ils viennent pour moi. Je n'ai pas remis les pieds sur cette planète depuis des années et je doute que la police m'y cherche toujours.

 

- Les policiers de toutes les galaxies te traquent, répliqua la jeune femme, pourquoi pas ici ?

 

- Bah ! Cela n'a aucune importance de toute façon ; j'ai changé de nom et avec ma barbe et mes moustaches blondes, ils ne me reconnaîtront pas en admettant qu'ils aient jamais su à quoi je ressemble.

 

- Sauf si quelqu'un t'a dénoncé.

 

De sa poche elle sortit un objet qu'elle déposa sur la table plastifiée aux couleurs criardes : une plaque émeraude de flic ! Il avait couché avec un inspecteur en civile ! La garce !

 

Réagissant à la vitesse de l'éclair, il souleva la table et la balança sur la femme flic qui resta coincée en dessous, sans pour autant l’empêcher de hurler à ses hommes de l’arrêter. Opérant un vif demi-tour, le Viking assomma le premier policier qui l'assaillit d'un formidable direct à la mâchoire. Son second poing s’abattit sur la tempe du dernier attaquant. Le policier vit un millier d'étoiles exploser devant ses yeux avant de sombrer dans l'obscurité complète de l'inconscience. Il s'effondra aux pieds du Viking qui déjà l'enjambait. Après quoi, ce dernier traversa la salle en trois bonds, écartant les malheureux qui se trouvaient sur son chemin, mais il ne sortit pas par la porte. Il fracassa la fenêtre lorsque son corps replié sur lui-même passa au travers. Il se retrouva dans la rue. Devant la porte dix soldats l'attendaient, surpris de le voir surgir par la fenêtre.

 

Il envoya les plus proches au tapis. Saisissant un corps inerte, il le souleva sans effort et le projeta sur ses adversaires plus éloignés qui hésitèrent une seconde de trop à tirer de peur de toucher leurs collègues. Il prit ses jambes à son cou. Il courrait sur le trottoir, slalomant entre les badauds ahuris. Il gagna une artère où un taxi flottant en anti-gravité chargeait un client. Entendant les forces de l'ordre se réorganiser dans son dos, il se décida vite. Il arracha le chauffeur de son volant, prit sa place dans la Vix Spéciale, un beau modèle, rapide et confortable, et oublia complètement le client, un de ces ronds de cuir obèses et craintifs, qui refermait juste sa portière. Il démarra sur les chapeaux de roues, plaquant l'homme contre son dossier.

 

Les sirènes hurlaient dans son dos. Il vira à gauche à plus de trois cents kilomètres à l’heure, écrasant son passager involontaire contre la vitre. Accélérant toujours, il prit à droite. Un véhicule se dressa soudain devant lui !

 

Bon sang ! Un sens interdit !

 

Il se rabattit sur le trottoir, chassant les passants paniqués.

 

Il enfila quatre rues ainsi. Il n'entendait plus la police et pensait l'avoir semée. Il revint sur la route, laissant derrière lui un sillage de boutiques dévastées, d'étalages réduits en miettes et de badauds terrifiés. Il roula encore un peu avant de décélérer pour se fondre dans la circulation.

 

Il suivait à présent un fourgon blanc qui devait rouler à - Oh ! - au moins dix kilomètres heure. Il klaxonna mais le véhicule ne broncha pas.

 

- Excusez-moi, entendit-il bafouiller.

 

Le géant blond se retourna pour fixer de ses yeux bleus le petit bonhomme suant de peur.

 

- Tiens ! Vous êtes encore là, vous !

 

- Pou... pourrai-je descendre, s'il vous plaît ?

 

Il le regarda méchamment, rétrécissant ses yeux à deux fentes cruelles.

 

- Foutez le camp.

 

Paniqué le rond de cuir bondit de la voiture tel un diable de sa boite. Le Viking riait à gorge déployée, il adorait effrayer ces minables citadins.

 

Débarrassé d'un poids encombrant, il put reprendre sa route dès que le fourgon lui libéra le passage.

 

 

*

 

* *

 

 

Assise sur un banc de la taverne, Dominique Arboy fulminait près de sa radio.

 

- Comment ça : disparu !

 

- Nous ne trouvons aucune trace du taxi, inspecteur, grésilla le poste.

 

- Mais c'est pas possible : je vous livre le Viking sur un plateau d'argent et vous le laissez filer !

 

- Désolé, inspecteur.

 

- J'en ai rien à foutre de vos états d’âmes. Un géant blond dans un taxi rouge, ça ne disparaît pas comme ça. Vous allez me retourner chaque millimètre carré de cette maudite ville jusqu'à ce que vous le retrouviez.

 

- Cessez de vous agiter, mademoiselle. Comment voulez-vous que je vous soigne dans ces conditions ?

 

Arboy regarda le médecin de la police qui bandait ses côtes brisées. Lorsque le Viking l'avait immobilisée sous la table, elle avait eu la cage thoracique enfoncée et déplorait cinq côtes abîmées, ce qui ne l’empêchait pas de se sentir en pleine forme tant sa constitution de Xalorienne était solide.

 

- Je vous répondrais bien quelque chose, docteur, mais j'aurais peur de vous choquer, répliqua-t-elle d’une voix mielleuse.

 

Il marmonna des propos incompréhensibles qu'elle n'écouta pas, déjà revenue à son émetteur-récepteur miniature.

 

- Envoyez un détachement au spaceport, qu'il surveille un vaisseau type BX : le Drakkar. Il ressemble à un tas de ferraille mais ne vous y fiez pas : il s'agit en fait d’un excellent engin équipé d'un ordinateur hautement sophistiqué.

 

« Inutile de me rappeler tant que vous n'aurez pas de résultats.

 

« Terminé.

 

- Terminé.

 

Elle se laissa aller sur le banc, appuyant son dos meurtri sur la muraille fraîche. Elle respira profondément et une légère douleur dans la poitrine lui rappela son accident.

 

Le docteur l'avait enfin abandonnée et elle commanda un whisky double dans la taverne dévastée. Elle remit sa chemise et posa ses jambes hautes bottées sur la table. Son verre dans une main, elle tenait dans l'autre l'hologramme d'une petite fille blonde aux immenses yeux bleus et rieurs, comme son papa. Elle eut un sourire attendri devant cette gamine de cinq ans qu'elle n'avait jamais vu, son père non plus d'ailleurs, puisqu'il ignorait jusqu'à son existence.

 

- Plus pour longtemps, Julie, je te le promets.

 

La radio crachota, la ramenant à la réalité.

 

- Inspecteur Arboy ?

 

- Oui.

 

- Nous avons retrouvé le taxi.

 

- Où ?

 

- Abandonné dans une ruelle de Sorlist.

 

- Sorlist ?

 

- Oui.

 

- Donc il ne se dirige pas vers le spaceport.

 

- A propos du spaceport, inspecteur...

 

- Qu'y a-t-il ?

 

- Le Drakkar a décollé dès que nos hommes l'ont encerclé.

 

Arboy posa ses coudes sur la table et se prit la tête dans les mains.

 

- Je vous avais dit de faire gaffe, merde. L'ordinateur vous a repéré et a filé.

 

- Sans son commandant ?

 

- Le Drakkar est programmé pour se sortir de ce genre de piège. Il va attendre le Viking sur une planète quelconque.

 

- Nous pourrions le poursuivre.

 

- Il n'existe pas de vaisseau assez rapide pour espérer rivaliser avec le Drakkar. Sauf chez les Sculd-Cathb, et encore.

 

- Mais...

 

Arboy coupa la communication. Si elle continuait cet entretien, elle dirait ce qu'elle pensait à ce policier stupide et borné et son chef lui reprocherait encore son mauvais caractère. De son porte-hologrammes elle extirpa une carte de la ville. Elle étudia les déplacements du Viking et réfléchit.

 

 

*

 

* *

 

 

Le géant blond tenait étroitement la fille par la taille. Il lui souriait et plaisantait depuis une heure. Même en lui faisant l'amour, il l'avait faite rire. S'il se débrouillait bien, elle le cacherait chez elle jusqu'à ce qu'il puisse s'envoler pour Xythaï où l'attendait son cher Drakkar.

 

Il embrassait la jolie blonde quand un bruit familier le mit aussitôt sur ses gardes. Il lâcha la fille et la plaça derrière lui afin de la protéger en cas de coup dur. Ils se trouvaient dans une station de voup, ainsi nommée car le bruit des capsules de transport quittant les arrêts ressemblait à un « voup » bref et retentissant.

 

Devant le Viking se tenait une superbe Xalorienne brune et armée d'un Stéropé II léger, maniable et surtout meurtrier, qu'elle pointait sur son cœur.

 

- Dominique !

 

- Heureuse que tu te souviennes encore de moi après deux longs jours d'absence.

 

Il s'approcha d'elle, les bras écartés comme s'il voulait l'enlacer.

 

- Ne bouge pas ou je dessine un petit trou dans ta belle chemise blanche. Juste sous le sein gauche.

 

- Écoute Dominique...

 

- Non. Toi, écoute et obéis. Fais partir la fille.

 

Sophie ne se le fit pas répéter, elle disparut dans les couloirs. « Pourvu qu'elle n'aille pas chercher la police ! » songea le Viking.

 

- J'ai une proposition à te faire, annonça Dominique Arboy quand ils furent seuls.

 

- Ai-je le choix ?

 

- Oui : tu acceptes ou je t'abats.

 

- Tu n'as pas le droit ; tu es flic. Le méchant, c'est moi.

 

- Je n'ai pas envie de rire, Viking. J'ai mal partout après le cadeau que tu m'as balancé en sortant de cette taverne qui devait voir ton arrestation, et je suis furieuse, alors tu vas m'écouter bien sagement ou je tire.

 

- Okay, je me rends. Que veux-tu ?

 

- J'ai une mission à te proposer en échange de ta liberté.

 

- Laquelle ?

 

- C'est très simple : je te lâche sur une planète, Ops, tu y déniches une mine de karme et je te rends ta liberté.

 

- Ça à l'air simple. Sauf que...

 

- Quoi ?

 

- Un : Ops est classée primitive et interdite. Quiconque s'en approche est abattu à vue par tes collègues. Deux : la karme est une drogue très rare et si des trafiquants ont, par je ne sais quel miracle, réussi à exploiter une mine là-bas elle est certainement plus gardée que les joyaux de la couronne d'Apur. Trois : je tiens trop à ma peau pour la risquer dans cette affaire alors qu'en refusant, je me contenterai d'une condamnation à perpétuité dans une paisible prison au fin fond de la galaxie. Quatre : quand bien même accepterai-je, pourquoi diable ne te roulerai-je pas en m'enfuyant avec mon Drakkar ?

 

Il la regardait, une étrange lueur dansait dans ses prunelles bleues. L'aventure le tentait mais il ne voulait pas avoir l'air de ce qu'il était : un cinglé prêt à tout pour le plaisir de l'action.

 

- Parce que je tiens ta fille, argua l'inspecteur.

 

Pendant le silence qui suivit, elle rangea son arme désormais inutile. Elle le tenait et ils le savaient tous les deux

 

- Ma quoi ?

 

- Ta fille.

 

- Je n'ai pas de fille, ni de fils d'ailleurs.

 

- Tu as une fille de cinq ans nommée Julie Kas. Sa mère s'appelle Michelle Kas. Tu l'as connue sur Xithos alors que tu t'y cachais à la suite du vol d’œuvres d'art au musée d'archéologie d'Aloma. Tu te souviens ?

 

- Parfaitement.

 

- Six mois après cette liaison qui en dura cinq, naissait Julie.

 

Elle lui lança l'hologramme d'une jolie fillette en petite robe bleu-pâle, jouant avec un ballon rose à rayures vertes. Il l'attrapa au vol et l'examina avec attention.

 

- Sa mère étant rousse aux yeux verts, l'enfant ne ressemble qu'à toi : blonde aux yeux bleus.

 

Il souriait.

 

- Elle est mignonne.

 

Arboy avait envie de rire : quel étrange phénomène que ce géant capable de vous tuer d'une seule main en broyant tous vos os, fondant devant une enfant.

 

- Adorable et très gentille.

 

- Tu la connais ?

 

- Par ouïe dire. Sa mère travaille chez nous et elle gardera son emploi si tu coopères. Si tu refuses, elle sera renvoyée et ne trouvera jamais d'autre place, tu peux me faire confiance. Tu sais ce que cela signifie ?

 

- Message reçu. Je pars quand ?

 

- Maintenant.

 

 

*

 

* *

 

 

Un sifflement traversa l'air immobile. Le Viking se coucha plus vif qu'un cobra. Il sentit quelque chose le frôler alors qu'il atterrissait le nez dans une épaisse couche d'humus.

 

- Je déteste les jungles, marmotta-t-il. Je déteste cette putain de mission. Mais par dessus tout, je déteste Dominique.

 

Le géant se releva avec la souplesse du félin. Il débarrassa son visage de la pourriture des feuilles en décomposition et s'assura qu'il n'avait rien perdu de son équipement. Depuis un mois qu'il errait sur cette maudite planète à la recherche d'une mine de karme, il avait pris l'habitude de ce genre d'alerte et ne laissait plus les oiseaux vampires l'approcher.

 

Il regarda vers le haut dans l'espoir de distinguer son agresseur dans le fouillis luxuriant des plantes grimpantes mêlées aux branches des arbres séculaires. Peine perdue il était impossible de voir à plus de trois mètres. Il réaffirma sa prise sur sa machette et reprit sa lente progression. Il abattit la large lame plate sur une liane géante qui s'effondra révélant... une énorme gueule squameuse !

 

Opérant un vif demi-tour, le Viking s'enfuit par la piste qu'il venait de dégager, détalant comme un lapin devant l'immense reptile affamé propriétaire de la gueule et des crocs démesurés qui la garnissaient généreusement. Dès qu'il eut un peu d'avance, il se retourna et brandit un Bellone. Il tira sans attendre ni viser. Le fort recul de l'arme le jeta à terre.

 

Il se releva un peu abasourdi. Dans l'air crépitant toujours d'énergie se répandit une lourde odeur de chair brûlée. Marchant avec prudence, le hors-la-loi revint sur ses pas. Il examina avec attention la gigantesque carcasse recouverte de grandes écailles luisantes afin de s'assurer de la mort du monstre. On ne savait jamais avec ces bestioles, même le crâne réduit en bouillie sanglante comme celui-ci dont la cervelle calcinée formait un étrange dépôt sur les arbres alentour, elles se relevaient, histoire de vous déchiqueter de leurs formidables griffes à moins que leur gueule aux crocs acérés ne vous brisât en deux avant.

 

Embrassant le canon court de son Bellone, le Viking replaça l'arme capable d’arrêter un tank en pleine charge, à sa ceinture déjà encombrée de multiples engins hétéroclites. A lui seul il ressemblait à une armée en marche. Il étira ses muscles en observant la longue piste ouverte par le reptile.

 

- C'est pas le tout, constata-t-il, mais j'ai une mine à découvrir moi !

 

Il regarda le cadavre fumant.

 

- L'exercice, ça creuse, commenta-t-il, et tu m'as donné faim, fichue bourrique.

 

Parmi les lames pendant à sa ceinture, il choisit un large poignard dont l'étrange luminosité bleutée trahissait le va et vient incessant de fines particules chargées de nettoyer et d’aiguiser l'arme en permanence. Il se découpa un steak épais et juteux qu'il fit rôtir sur son mini lance-flammes. Il s’était installé à quelques distances du corps pour manger en paix car il savait que tous les charognards à poils ou à plumes du quartier allaient s'inviter au festin, or il ne tenait pas à être présent lorsqu'ils arriveraient.

 

Il avala son repas en trois bouchées et reprit sa route, pas question de s’attarder.

 

 

*

 

* *

 

 

Le Viking se leva avec le jour. Comme d'habitude il avait passé une nuit épouvantable à cause de la vermine et des multiples carnassiers de cette jungle. Tous semblaient décidés à l'inscrire à leur menu. A chaque cadavre qu'il abandonnait, il devait déplacer son camp de quelques kilomètres.

 

Après un solide petit déjeuner et l'attaque d'une espèce de lion survitaminé bleu et jaune, il partit sur un étroit sentier découvert la veille et suivi toute la nuit. Quand il aperçut une ombre devant lui, un Stéropé bondit dans son poing.

 

- Karium, étranger. Je suis un ami.

 

L'homme s'approcha. Le Viking put ainsi distinguer ses traits. Il mesurait environ un mètre quatre-vingt. Trop d'épreuves endurées l'avaient marqué mais il se dégageait de sa physionomie, de son regard bleu presque caché sous une chevelure noire et hirsute, une force tranquille, un calme olympien des plus impressionnants.

 

- Par les couilles d'Alryn ! Un blanc parlant le galato au fin fond de cette jungle délirante ! Vous vous êtes paumé ou quoi ?

 

L'homme lui sourit bien que le canon du fusil le tint toujours en respect. En effet le Viking n'oubliait pas qu'il traquait des trafiquants de drogue, aussi demeurait-il méfiant.

 

- Vous ne croyez pas si bien dire, mon ami, répliqua l'inconnu. Je suis pilote d'essai Skuld-Cath...

 

Le Viking grimaça, désapprobateur ; les Skuld-Cathb et leur droiture morale n'étaient guère appréciés dans l'univers et surtout pas des types comme lui.

 

-...et mon prototype a été abattu par les surveillants de cette planète lors d'une sortie.

 

- Qu'est-ce que vous faisiez dans le coin alors qu'Ops est interdite ?

 

- Mon ordinateur m'avait lâché et j'ignorais ma position.

 

- Oh ! Même les grands Sculd-Cathb peuvent se perdre !

 

- Nous ne sommes pas infaillibles, répondit l'homme en riant.

 

Il guidait à présent le Viking, toujours arme au clair, à travers les arbres. Il le conduisit jusqu'à un camp de fortune où il lui offrit des fruits.

 

- Je suis désolé mais c'est tout ce dont je dispose.

 

- Ça ira.

 

Le géant blond étudiait les précaires installations du pilote.

 

- Vous n'avez pas d'arme.

 

- Je n'en ai pas besoin.

 

- Ah oui ! J'oubliais : « Paix et amour où passent les Sculd-Cathb. »

 

L'homme sourit mais le Viking ne s'y trompa pas : il savait se défendre, même sans arme.

 

- Dites-moi : vous vivez dans le coin depuis longtemps ?

 

- Plus de cinq ans.

 

Le géant s'étrangla.

 

- Cinq ans ! Mais comment avez-vous survécu pendant tant de temps avec les charmants habitants de cette jungle ?

 

Encore un sourire.

 

Le Viking renonça. Il y avait plus urgent :

 

- En vous baladant vous n'auriez pas découvert une mine, par hasard ?

 

- Une mine de karme exploitée par des trafiquants.

 

- Vous savez où elle est ?

 

- Oui.

 

- Alors pourquoi ne pas avoir demandé aux mineurs de vous embarquer ?

 

- Ce sont des Pirates Rouges, ils m'auraient abattu et je tiens à ma peau. Mais si vous me promettez de m'emmener avec vous lorsque vous quitterez cette planète, je vous y conduis.

 

- Marché conclu.

 

 

*

 

* *

 

 

Le Viking régla ses jumelles. Il distinguait nettement le trou béant qui n'était autre que l'entrée de la mine.

 

- J'aurais pu passer devant cent fois sans la voir.

 

Il balaya à nouveau les sous-bois impénétrables à la recherche d'éventuels guetteurs ou d'animaux dangereux.

 

- A quand remonte leur dernière visite ?

 

- Il y a un ména environ que je n'ai pas entendu leurs vaisseaux, répondit le Sculd-Cath allongé à ses côtés dans l'humus.

 

Il délaissa ses jumelles ultra-plates pour un holographe de haute précision que lui avait fourni Dominique. Décidément, il était très attentionné ce petit inspecteur. Il prit quelques clichés puis se leva pour des plans rapprochés. Bientôt il pénétrait dans la grotte. Le Sculd-Cath demeurait à l’arrière au cas où les trafiquants débarqueraient.

 

Le Viking s’enfonça profondément dans le tunnel de roche. Il découvrit rapidement les premières traces d'une exploitation humaine lorsqu'il buta dans une boîte de conserve et s'étala de tout son long sur le sol rocailleux. Il ne se releva pas sans proférer quelques jurons bien sentis, puis reprit son exploration à la lueur de sa torche. Captivé par l'outillage qu'il trouvait traînant un peu partout sur le sol, il ne songeait qu’à multiplier les preuves pour le rapport d'Arboy, aussi se cogna-t-il contre le plafond devenu subitement trop bas. Il allait exprimer clairement ce qu'il pensait des mineurs incapables de construire un tunnel pour des hommes de son gabarit lorsqu'un bruit en provenance de l'extérieur l'alerta.

 

Éteignant sa lampe, il se coula dans l'ombre. Des voix d’hommes lui parvinrent distinctement. Il en dénombra huit, ou neuf. Ils se dirigeaient rapidement vers lui et, d'ici deux minutes ils le découvriraient. Il réfléchit. Non pas que ce fut son habitude mais il n'avait pas le choix. S’il s’enfonçait davantage dans la mine, il risquait de ne jamais trouver la seconde sortie en admettant qu'il en existât une, ce dont il doutait. Mais, à l'opposé, s'il fonçait sur les trafiquants à un contre neuf, il avait peu de chance.

 

Ouais.

 

Ben.

 

Tant pis.

 

 

*

 

* *

 

 

Les Pirates Rouges discutaient avec animation. L'exploitation de la karme leur rapportait davantage que le pillage des vaisseaux spatiaux et pourtant ils se sentaient mécontents. L'inaction leur pesait. Ils avaient besoin de l'excitation du danger, de la résistance acharnée des défenseurs et des soldats chargés de protéger les cargos pour vivre. Ici, il leur suffisait de berner une bande de poulets minables pour se remplir les poches aussi en venaient-ils à regretter que la police fut si faible.

 

Si les Pirates Rouges voulaient de l'action, ils allaient être servis au delà de leurs espérances.

 

Surgissant de l'ombre un démon noir se jeta sur eux avec une force inouïe. En un instant trois hommes gisaient à terre. La lampe brisée éclairait mal, donnant à la scène un aspect fantomatique de circonstance.

 

Un trafiquant tira.

 

Le faisceau d'énergie se réfléchit sur la roche menaçant de tout faire s'écrouler.

 

- Déconne pas, Frank ! Tu vas nous tuer !

 

Le Viking apparut soudain devant le tireur maladroit.

 

- C'est vrai, Frank. Fais gaffe.

 

Il arracha l'arme des mains de l'homme ahuri et son poing s’écrasa sur sa face brunie.

 

La torche perdit son éclat et l'obscurité la plus complète envahit le tunnel. Mais le combat ne cessa pas pour autant. Frappant toujours de droite et gauche, les Pirates Rouges confondaient amis et ennemis.

 

- Bon sang ! Que quelqu'un allume une lampe !

 

Quelqu'un alluma une lampe.

 

Quatre trafiquants encore debout se regardaient au fond d'une mine sur une planète perdue, leurs compagnons étendus à leurs pieds.

 

 

*

 

* *

 

 

Le Viking courait droit devant lui, le sourire aux lèvres. Il imaginait la tête des pirates lorsqu'ils s'apercevraient qu'il avait fui les laissant s'assommer entre eux.

 

Bientôt il aperçut la lumière verdâtre et opaque du dehors. Il força l'allure : jamais il n'aurait cru qu'un jour il serait heureux de revoir les jungles bourbeuses d'Ops.

 

Une surprise l'attendait.

 

À peine eut-il fait deux pas hors de la mine qu'une vingtaine de Pirates Rouges, armés jusqu'aux dents se rassemblait à l'entrée. Il s'arrêta. Dans son dos les derniers éclats de la bagarre avaient disparu et il entendait au loin une course précipitée.

 

Le Viking évalua en un instant les armes de ses adversaires, des Dards XV, des Stéropés, tous de très bonne qualité et extrêmement dangereux.

 

Misant sur l'effet de surprise il se jeta sur eux en hurlant.

 

Il tomba sur trois hommes stupéfaits. Dans la mêlée qui suivit, il ne sut jamais ce qui se passa au juste. Il y eut des décharges d'énergie, des cris, des coups et... le plus beau combat de sa carrière.

 

Finalement écrasé sous le nombre il se retrouva enserrer dans des cercles d'énergie et dût cesser le combat sous peine de périr étouffé.

 

On le releva sans douceur.

 

Un pirate lui donna l'accolade :

 

- Ben, mon vieux ! Sacrée bagarre.

 

- Heureux qu'elle vous ait plu.

 

- Ça tu peux le dire.

 

Le Viking contemplait la face rougeaude d'un rouquin bedonnant dont l'épaisse barbe mangeait la moitié du visage sans pour autant parvenir à dissimuler son grand sourire.

 

- Et le tour que tu as joué aux autres, dans la mine : joli !

 

Moqueur, le Viking s'inclina pour saluer le compliment.

 

Le pirate essuya le sang qui coulait au coin de ses lèvres d'un revers de bras. Comme ses compagnons, il portait le costume typique des flibustiers terriens : de hautes bottes de cuir, des culottes serrées aux genoux, retenues à la taille par une large ceinture dont les extrémités pendaient, une chemise débraillée à amples manches et un chapeau trop vieux pour avoir encore une forme définie. Le tout des couleurs les plus criardes de la création.

 

- Écoute, mon grand : tu t'es foutu dans une galère sans nom en découvrant ce trou. » Il indiquait la grotte de son pouce. « Tu comprends qu'on ne peut pas te laisser partir comme ça. Tu en sais maintenant beaucoup trop et tu nous as vus. Tu pourrais nous identifier.

 

- Si je puis exprimer une dernière volonté avant que vous ne régliez mon problème, je vous demanderais d’arrêter les discours : j'ai horreur de ça.

 

L'homme roux rit franchement.

 

- Décidément, tu me plais. Je te fais une proposition : on oublie cette malheureuse histoire et tu te joins à nous. Okay ?

 

- Tu es le capitaine ?

 

- Jack le Roux, capitaine de « la Futée ». Alors... tu acceptes ?

 

Tombant du ciel une forme sombre s'abattit sur les trafiquants. Elle évoluait à une vitesse stupéfiante. Inutile de tenter de la saisir : elle n'était déjà plus où vous l'aviez vue.

 

Les hommes s'écroulaient, plongés dans un profond sommeil sans rêve.

 

Les anneaux d'énergie maîtrisant le Viking s’évanouirent soudain et un Stéropé réglé à l'intensité minimale apparut dans ses mains. Aussitôt il entra en action. Usant plus de ses poings et de la crosse de l'arme que des rayons meurtriers, il nettoya l'espace autour de lui.

 

Jack le Roux reçut son pied dans l'estomac puis sur la tempe. Le Viking bondit. Pour choir lourdement sur deux hommes qui fuyaient. Il en assomma un troisième d'un formidable direct.

 

Le combat avait duré deux minutes. Il ne restait plus devant la galerie minière que deux êtres valides :

 

- Bien joué, Skuld-Cath, râla le Viking, tu aurais pu intervenir plus tôt.

 

- Vous vouliez des preuves, non ?

 

Il acquiesça et l'autre tapota l'holocaméra passée à son cou.

 

- Eh bien, tout est là. Avec ceci ces trafiquants de karme seront condamnés sans doute possible.

 

- Ouais ? N’empêche que j'ai manqué d'y laisser ma peau, moi !

 

- Vous ne risquiez rien, sinon je serais intervenu.

 

- Grand merci.

 

Le Viking fit une petite courbette railleuse.

 

 

*

 

* *

 

 

Vautré au fond de son confortable canapé à bord de son cher Drakkar, le Viking n'avait pas envie de bouger. Il bailla mais n'eut pas le courage de s'étirer...

 

...quand ce maudit ordinateur se mit à parler.

 

- Tu as un appel.

 

- Laisse tomber, Drakkar. Je ne suis là pour personne.

 

- C'est l'inspecteur Dominique Arboy.

 

- Okay, soupira-t-il. Envoie.

 

Aussitôt le charmant minois de la jolie brune se matérialisa dans la pièce.

 

- Cesse de grommeler, Viking.

 

- Je n'aime pas ce sourire sur tes lèvres. C'est celui que tu as fait en me présentant ta plaque de flic.

 

- Allons, ne t’avais-je pas promis l'amnistie ? N'es-tu pas libre ?

 

- Que veux-tu ?

 

- J'ai une proposition à te faire...

 

- Non.

 

Il bondit hors du canapé, propulsé par la crainte de ce qui allait suivre.

 

- Écoute : la mère de ta fille garde son emploi, un Skuld-Cath a retrouvé les siens, les trafiquants sont en taule pour un bout de temps et grâce à toi, la karme ne tuera pas cette année. Après une telle réussite mes chefs sont d'accords pour que nous prolongions notre association. Nous formons un tandem extraordinaire, il serait dommage de nous séparer.

 

- A ton tour de prêter attention à mes paroles, Dominique. Dans cette foutue jungle des vampires ont voulu me saigner à blanc, des monstres me bouffer, des pirates m'égorger et je ne parle pas des sables mouvants.

 

- Il n'y a pas de sables mouvants sur Ops.

 

- C'est pourquoi je n'en parle pas.

 

- Oh ! S'il te plaît. J'ai un gang d'esclavagistes à démanteler, des voleurs à arrêter, des délinquants de moins de quinze ans à redresser, des matchs sportifs truqués à démasquer, des poulets véreux à identifier, des...

 

- Drakkar, fais-la taire !


 

 

 

 

Les aventures du viking reviennent bientôt…

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15 mai 2009

Quatrième de couverture

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      Il est l’homme le plus recherché de la  galaxie.  Brute  sans  foi  ni  loi,        sauf  les  siennes  quand  ça l’arrange, il ne jure que par sa liberté. Surnom : VIKING.
       Elle a la  réputation  d’être le meilleur flic de cette même  galaxie,  la  plus  belle  femme   et  la   plus dangereuse.       Elle  obéit  scrupuleusement  à la loi, quand elle ne peut pas faire autrement.
      Surnom : mieux vaut ne pas en user devant elle.
      Tour  à  tour  amants,  alliés,   ennemis,  ils   vous entraînent       dans leurs aventures rocambolesques à la rescousse de l’opprimé…ou de leurs bourses plates.

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